Parmi les Cafés histoire qui avaient été programmés en 2021 avant la fermeture des cafés, nous avions prévu de ré-inviter Antoine BOULANT, pour parler de son nouvel ouvrage, publié en février 2021, La Journée révolutionnaire. Le peuple à l’assaut du pouvoir, 1789-1795.

Il va de soi que, lorsque les cafés rouvriront, nous inviterons Antoine BOULANT* pour venir nous parler de cette « Journée révolutionnaire ».

En attendant, présentons son œuvre en sa compagnie:

Antoine Boulant quels furent les grands moments, les plus marquants de ce que l’on appelle les Journées révolutionnaires, et quelles en furent les principales causes ?

Antoine BOULANT - Cafés HistoireAntoine Boulant : Entre 1789 et 1795, Paris fut agité par huit grandes « journées révolutionnaires » qui virent le peuple prendre les armes pour attaquer le pouvoir afin d’obtenir des mesures à caractère politique, économique ou social, voire pour le renverser au nom de la souveraineté populaire. Les trois plus fameuses de ces journées sont :

  • la prise de la Bastille (14 juillet 1789),
  • l’invasion du château de Versailles (6 octobre 1789) et
  • la prise du palais des Tuileries (10 août 1792).

Les causes profondes de ces insurrections furent à la fois économiques (augmentation du prix du pain, parfois aggravé par les conditions climatiques comme lors du terrible hiver 1794-1795) et politiques (méfiance à l’égard de Louis XVI ou des députés de la Convention nationale). Des événements précis contribuèrent à les déclencher, comme le renvoi du directeur des Finances Jacques Necker, le banquet des gardes du corps à Versailles ou le manifeste du duc de Brunswick.

Qui étaient les insurgés lors de ces journées révolutionnaires ?

Livre : La Journée révolutionnaire, le peuple à l'assaut du pouvoir - 1789-1795Antoine Boulant : Contrairement à une idée longtemps répandue, les insurgés n’étaient pas composés des éléments les plus pauvres de la population parisienne. C’était majoritairement des artisans, des commerçants et des employés, travaillant pour beaucoup dans le faubourg Saint-Antoine. Les femmes furent particulièrement nombreuses lors de certaines journées, comme en octobre 1789. Certains militaires vinrent nourrir les rangs des insurgés, notamment les gardes-françaises et de nombreux gardes nationaux. Le mouvement sans-culotte, qui se développa dans un grand nombre de sections parisiennes, contribua à encourager les émeutes.

Ces Journées furent-elles spontanées ou préparées à l’avance ?

Antoine Boulant : Si la prise de la Bastille fut la seule journée véritablement spontanée, les autres furent préparées, parfois même très minutieusement. Les clubs jouèrent un rôle important dans la préparation des esprits, de même que de nombreux journalistes. Des meneurs comme Santerre, Maillard ou Fournier organisèrent la mobilisation populaire sur le terrain, lançant des mots d’ordre. Il est très probable que la corruption joua un rôle important dans certaines circonstances. Tandis que se déroulaient manifestations ou rassemblements, de nombreuses sections parisiennes faisaient pression sur le pouvoir en envoyant des pétitions.

Ces insurrections firent-elles beaucoup de victimes ?

Antoine Boulant : Face à un pouvoir le plus souvent désorienté et incapable d’opposer aux insurgés une résistance nombreuse, déterminée et bien commandée, plusieurs milliers d’individus s’organisaient et se procuraient des armes avant d’attaquer le lieu du pouvoir, qu’il s’agît de la Bastille, du château de Versailles ou des Tuileries. Face à la foule qui s’approchait, le pouvoir tenta parfois de faire des concessions. Ce fut ainsi le cas lorsque Louis XVI accepta le 5 octobre 1789 de sanctionner la Déclaration des droits de l’homme, ou lorsqu’il décida de se réfugier à l’Assemblée nationale le 10 août 1792. Ces concessions ne suffirent cependant jamais à empêcher l’invasion du lieu de pouvoir par les insurgés. Si quatre journées ne firent aucune victime, deux se soldèrent pas le massacre de quelques individus, et deux par des combats meurtriers : la prise de la Bastille entraîna une centaine de morts, tandis que celle des Tuileries fit un millier de victimes, soit tuées au combat, soit massacrées par les insurgés.

Les insurgés obtinrent-ils des résultats ?

Antoine Boulant : Si une journée (celle du 20 juin 1792) n’eut aucune conséquence immédiate, toutes les autres permirent aux insurgés d’obtenir des résultats. La plus spectaculaire fut sans conteste la prise du palais des Tuileries, qui entraîna la chute de la monarchie et la convocation d’une nouvelle assemblée élue au suffrage universel masculin. La prise de la Bastille obligea le roi à reconnaître l’autonomie de la nouvelle municipalité parisienne. Les journées d’octobre le contraignirent à venir s’installer dans la capitale.

À quel moment cessèrent ces insurrections ?

Antoine Boulant : La dernière insurrection populaire fut celle du 20 mai 1795, qui vit l’invasion de la Convention par le peuple des faubourgs. Celle-ci ayant ordonné le désarmement du faubourg Saint-Antoine, les sans-culottes renoncèrent dès lors à toute action violente, et il fallut attendre la révolution de juillet 1830 pour que des barricades apparaissent de nouveau dans Paris.

L’ouvrage :

Antoine BOULANT, La Journée révolutionnaire. Le peuple à l’assaut du pouvoir, 1789-1795, éditions Passés Composés, février 2021.

Table des matières

Introduction

  • Chapitre 1. Aux origines de la journée révolutionnaire
    • De la disette au pacte de famine
    • Un pouvoir contesté
    • La menace des baïonnettes
    • Le feu aux poudres
  • Chapitre 2. La foule révolutionnaire
    • Un peuple d’artisans
    • Le poids des faubourgs
    • Gardes-françaises et gardes nationaux
    • Le mouvement sans-culotte
  • Chapitre 3. Meneurs et instigateurs
    • Les députés
    • Les municipaux
    • Les clubistes
    • Les journalistes
    • Les meneurs
  • Chapitre 4. Naissance de l’émeute
    • Mots d’ordre et fausses nouvelles
    • Le rôle de la corruption
    • Une dynamique collective
    • Le mouvement sectionnaire
    • Un pouvoir indécis
  • Chapitre 5. Le peuple en marche
    • Premiers rassemblements
    • Une procession armée
    • Des effectifs variables
    • Des troupes peu disposées
  • Chapitre 6. À l’assaut du pouvoir
    • Avant l’attaque
    • « Rien ne pouvait empêcher le torrent »
    • Face au peuple
    • Une défense impuissante
    • Au prix du sang
  • Chapitre 7. Lendemains d’émeute
    • Un moment de bascule
    • Des réactions contrastées
    • Contenir le peuple

Conclusion
Notes
Bibliographie
Index
Remerciements

* Les Cafés Histoire avec Antoine Boulant : vidéos, compte-rendus, livrets documentaires

Le tribunal révolutionnaire. Punir les ennemis du peuple,
Café Histoire du 16 avril 2019

Le Tribunal révolutionnaire

Saint-Just, l’Archange de la Révolution,
Café histoire du 4 février 2020

Café Histoire Saint-Just, l’Archange de la Révolution