Par Léa Gasquet, janvier 2018

Le café et le débat : deux passions françaises. Depuis les années 90 et l’apparition des cafés philo, certains bars ont été investis comme lieux de réunion autour de sujets de société aussi divers que variés : histoire, littérature et même santé au travail… Tour de table et de zinc.

À deux pas de la place de la République, le premier étage du Balbuzard, un bistrot parisien à la déco mi-rococo mi-rustique, est bondé. Le papier peint baroque étale ses motifs floraux pourpres et or sous le plafond aux poutres apparentes.

Plus de quarante personnes, dont une large majorité de femmes, sont venues participer à un café citoyen « santé au travail » autour d’un thé ou d’un verre de rouge. Les retardataires se pressent.

« Que dire sur le harcèlement moral en 2017 » sera la thématique de la soirée. Marie-France Hirigoyen, l’intervenante de cette quatrième édition, est une référence en la matière. Psychiatre et psychanalyste, elle publie en 1998 Le Harcèlement moral. La Violence perverse au quotidien, un essai vendu à plus de 450 000 exemplaires dans vingt-quatre pays.

Déshumanisation du monde du travail, management pervers, isolement des victimes, elle livre les clés de compréhension de ce mal qui ronge de plus en plus de salariés. Après 45 minutes d’intervention, la parole est donnée à la salle à temps égal.

« Sommes-nous moins résistants qu’avant aux humiliations ? », s’interroge Thierry, la cinquantaine, médiateur de conflit. Le dialogue s’instaure entre les participants. « Le harcèlement moral est un fourre-tout juridique », déplore une élégante sexagénaire qui se présente comme magistrate dans le droit du travail. « L’objectif est de faire se rencontrer des spécialistes et le grand public, une fois par mois, afin de transmettre des outils d’analyse. On veut former des sentinelles dans les entreprises qui puissent identifier les maux et agir », explique Céline Raux-Samaan, l’une des organisatrices.

Lancés en septembre, les cafés citoyens « santé au travail » sont nés de la rencontre de Céline, 47 ans, éditrice, et de Patrice Sawicki, 48 ans (tous deux victimes de harcèlement), avec Marie Pezé, psychanalyste et fondatrice des consultations « souffrance et travail » à Nanterre.

Siné Mensuel, Janvier 2018 : https://www.sinemensuel.com/societe/apres-breves-idees-de-comptoir/