[PARIS] Peindre l’Histoire
L’événement historique et la peinture
Si l’histoire se lit dans les livres, elle peut également se vivre par les images. Ainsi l’Église chrétienne utilisa la représentation iconographique pour enseigner à ses fidèles les évangiles et la vie des saints. Le pouvoir royal l’imita. Au XIXe siècle, le genre faisait toujours fureur : la peinture d’histoire contribuait alors à la glorification d’un passé que l’on voulait commun aux Français.
Or cette iconographie était souvent peu sûre. Les mises en scène des événements choisis, dans leur théâtralité, leur donnaient une importance qu’ils n’eurent pas toujours. Quant aux personnages, réduits à des acteurs auxquels on prêtait des émotions qu’ils n’avaient sans doute jamais éprouvées, ils prenaient dans ces compositions des rôles déterminants qu’ils n’avaient parfois pas tenus. Pourtant, longtemps, cette peinture d’histoire fut une référence historique réelle, une source véritable.
L’historien Didier LE FUR décrypte les figures emblématiques – Vercingétorix, Clovis, Geneviève, Charlemagne, Saint Louis, Jeanne d’Arc, François Ier et Henri IV – qui ont contribué à la naissance d’un sentiment national, et ce à partir d’une iconographie riche, audacieuse et souvent fausse, mais toujours vivante dans notre imaginaire puisqu’exposée dans les monuments et musées les plus fréquentés de France.
L’intervenant
Docteur en histoire, spécialiste du XVIe siècle, Didier LE FUR est l’auteur de plusieurs biographies remarquées, notamment un monumental ouvrage consacré à François Ier, qui a largement renouvelé l’historiographie de la période. Didier LE FUR a reçu en 2017 le Grand Prix de la Biographie politique pour sa biographie de Diane de Poitiers.
Bibliographie Didier Le Fur
- Peindre l’Histoire, Paris, Passés Composés, 2019, 176 p.
- Et ils mirent Dieu à la retraite. Une brève histoire de l’histoire, Paris, Passés Composés, 2019, 233 p.
- Une autre histoire de la Renaissance, Paris, Perrin, 2018, 250 p.
- Diane de Poitiers, Paris, Perrin, 2017, 240 p.
- 100 citations historiques expliquées, Paris, Le Chêne, 2016, 208 p.
- François Ier, Paris, Perrin, 2015, 1016 p.
- L’Inquisition, enquête historique : France, XIIIe-XVe siècle, Paris, Tallandier, 2012, 190 p.
- Le Royaume de France en 1500, Réunion des musées nationaux, 2010.
- Louis XII : un autre César, Paris, Perrin, 2010 (1re éd. 2001), 369 p.
- Henri II, Paris, Tallandier, 2009, 612 p.
- Charles VIII, Paris, Perrin, 2006, 477 p.
- Marignan : 13-14 septembre 1515, Paris, Perrin, 2004, 340 pages.
- Anne de Bretagne : Miroir d’une reine, historiographie d’un mythe, éd. Guénégaud, 2000, 223 p.
Compte rendu
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La réécriture de l’histoire au profit du roman national est un phénomène constant à toutes les époques et dans tous les pays. En France, la tradition centralisatrice a conduit les différents gouvernements à réunir le peuple dans une même histoire commune. Des héros sont mis en avant et des mythes sont créés, faisant de l’histoire une discipline toujours mouvante et au service des ambitions des gouvernants.
La monarchie française utilise l’image pour se glorifier, notamment à travers les vitraux, la tapisserie puis la peinture. À partir de Louis XII, les rois et les princes sont représentés dans leur action du moment. Tandis que se développe la peinture sur toile, la diffusion s’élargit au XVIIe siècle et les événements glorieux sont magnifiés, notamment à travers les scènes de bataille.
La Révolution et l’Empire peignent également les événements de leur temps, avec le souci de se rattacher au passé. Napoléon s’insère dans une longue lignée tout en célébrant le temps présent. On va notamment chercher la figure de Charlemagne et de saint Louis, tout en façonnant la notion de civilisation afin de créer un sentiment national.
La peinture arrive dans les musées, notamment au Louvre. Celle que l’on surnomme « troubadour » remporte un énorme succès, la peinture d’histoire restituant les grands événements du passé. La notion de patrimoine intègre le sentiment national. Parallèlement, les représentations historiques se diffusent beaucoup par la gravure et se répandent dans les manuels scolaires.
Plusieurs figures sont mises en avant au gré des époques : Clovis (Franc puis Gaulois), Vercingétorix (un homme mort pour sa patrie, sorte de martyr laïc qui devient un héros national), sainte Geneviève (bergère dont on porte la figure en procession), Jeanne d’Arc (dont la popularité est exceptionnelle et dont la figure est réhabilitée par Napoléon, avant d’être virilisée sous Louis-Philippe) ou Henri IV (qui devient une icône après sa mort et incarne un roi humain, pacificateur et père de son peuple).
Peindre l’Histoire. L’événement historique et la peinture,
un Café Histoire organisé par l’association Thucydide
Intervenants
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Didier LE FUR